M ~愛すべき人がいて~ | Chapitre 1

Chapitre 1
Rencontre avec M


Certains matins, je ressens une grande tristesse.
Quand cela m’arrive, je m’arrête là où je suis et je sers mon sac fermement contre ma poitrine en levant les yeux ciel. Le ciel que l’on peut voir entre les bâtiments, le ciel visible derrière les fils électriques et le ciel qui sent l’odeur de la pluie. Je désirais tellement voir toutes ses choses inconnues que j’ai souhaité que le temps s’écoule particulièrement vite.
Je voulais grandir rapidement. Je voulais devenir une personne plus forte qu’à cette époque.
En regardant à nouveau le ciel, je me suis mise à penser à ça. Je me suis rendu compte à ce moment que personne ne comprendrait ce que je ressentais et quand j’ai pris enfin conscience de cela, la journée est déjà bien entamée.

La société à laquelle j’appartenais à ce moment là me demandais beaucoup d’expérience et de travail. Quand je suis apparue pour la première fois dans une série télévisée à l’âge de quinze ans, je n’étais encore qu’une nouvelle venue à Tokyo et les gens ont commencé à me considérer comme « actrice ».
Je n’aimais pas mon nom de scène « Kurumi Hamasaki » donné par la boîte et j’ai décidé de le changer par mon vrai nom l’année suivante. Quand on m’appelle « Ayumi Hamasaki » aujourd’hui, je me sens digne d’être moi-même, pas une autre personne, et je peux faire face et rester debout.

Lorsque j’ai commencé à participer à un cours d’activité sur les arts de la scène dans une école secondaire privée en avril, j’étais assez à l’aise avec mon planning d’actrice et idole. Je n’avais pas besoin de fournir d’explications gênantes si j’étais souvent absente du travail et cela m’a le plus soulagé. Je n’avais pas trop changé mon rythme de vie.
Je n’avais pas d’ami à l’école que l’on pourrait hisser au rang de meilleur ami. Du moins je ne l’ai jamais fait. La frontière entre mes camarades de classe et mes collègues était claire pour moi et je pensais ne pouvoir me confier à aucune personne dans cette salle de classe.
Je ne voulais pas être amie avec mes collègues non plus. Mais c’est l’actrice Mei qui m’a effacé cette idée de la tête. J’ai passé beaucoup de temps avec elle. Et même après avoir passé la moitié de la journée ensemble, nous nous donnions rendez-vous sur le chemin du retour.

Ce jour là, après ma réunion, j’ai contacté Mei, comme d’habitude, pour que l’on se retrouve à Shibuya.
Quand je suis passée devant la statue de Hachiko à la gare de Shibuya et que je me suis approché de l’intersection, je me suis rendue compte que j’avais changé d’avis sur ma collègue. J’ai traversé le carrefour en forçant sur mes genoux pour ne pas être avalée par les vagues de gens qui vont et viennent, puis j’ai traversé l’intersection et je me suis arrêtée pour voir les fruits de la vitrine du Nishimura Fruit, puis j’ai levé les yeux et fixé le panneau publicitaire de la tour 109.
Le ciel de cette fin d’année était complètement noir.
Debout à l’entrée de la tour 109, j’ai baissé mon regard sur ma montre, j’avais 5 minutes d’avance. Comme à chaque fois, il n’y avait pas de traces de Mei. C’était devenu une habitude de l’attendre.

« Tu m’as attendu ? Je suis désolée. »

Quand j’ai entendu cette magnifique voix, j’ai relevé mon visage et il y avait Mei qui souriait, repoussant ces longs cheveux noirs et raides avec sa main droite. Je me suis retournée d’un pas souple, et j’ai avancé vers la route.
Nous avons suivi le trajet habituel avec Mei. J’ai jeté un œil aux vêtements de ma boutique préférée, puis nous sommes passées devant un magasin d’accessoires qui vendait beaucoup d’objet de couples et j’ai essayé des bottes dans un magasin de chaussures en souterrain.
Les chansons de Noël ne cessaient de se jouer dans les magasins. Lorsque vous écoutez cette mélodie, l’agitation de cette fin d’année se répercute sur votre corps. Cela rend les gens un peu plus gais et tout le monde va quelque part à la recherche de quelque chose.
Mei et moi avions aussi un endroit où aller cette nuit-là.

Après avoir mangé au McDonald’s de la rue principale de Shibuya, nous sommes montées à bord de la ligne de Toyoko, puis avons pris la ligne Hibiya par Nakameguroichi et sommes descendus à la gare de Roppongi. La gare surpeuplée n’était qu’un aperçu de l’agitation nocturne de Roppongi en décembre.
Nous avons traversé la foule et, quand nous sommes arrivées au bout de la 7ème rue, il y avait un immense escalier qui rayonnait d’une lumière bleue et une longue file d’attente devant.

« … Nous devons faire la queue. »

Après ces mots, Mei s’est alignée à la longue file de personnes. Il y avait des gens qui se chevauchaient et occupaient la route menant aux escaliers et il n’étais pas facile d’y accéder. Je me suis rangée dans cette queue qui progressait très lentement et imaginais le choc que j’allais vivre au moment de rentrer. Un petit tremblement se propagea au milieu de ma poitrine, puis dans tout mon corps.

Le Velfarre avait ouvert ses portes en décembre 1994. Montée par la société Avex et décrite comme la « plus grande discothèque d’Asie », elle a su toucher le cœur de ses jeunes visiteurs. Une semaine après l’ouverture, l’énorme discothèque, qui apparaissait quotidiennement dans les actualités nationales, s’est vu accueillir des personnes venants de tout le Japon et le paysage du quartier de Roppongi a complètement changé.

Après trois heures de queue, nous étions déjà le jour suivant, et nous avons enfin atteint les escaliers situés à l’entrée. Au fur et à mesure que nous nous dirigions vers les marches couvertes d’un tapis rouge, l’énorme vibration transmise de l’intérieur du club s’élevait de nos orteils à notre tête.
Quand j’ai finalement essayé de passer la porte, un puissant videur en costume noir s’est opposé devant Mei et moi.
Il nous a interrogé sur notre âge avec sa grosse voix, et elle a répondu « 18 ans » et le videur nous a regardé des pieds à la tête. Cela m’a fait penser au jeu où la règle est de ne pas détourner les yeux sinon c’est perdu, il ne fallait pas se laisser avoir sinon nous ne pouvions pas entrer.
Le videur est parti dire quelque chose au petit microphone et est revenu nous ouvrir la porte, il nous a conduit dans une salle avec un ascenseur faiblement éclairé et quand nous avons retrouvé nos esprits nous étions déjà dans l’ascenseur.

La porte s’est ouverte sur le troisième sous-sol. Après avoir déposé nos manteaux et nos sacs dans le vestiaire, nous avons avancé dans l’atrium du troisième sous-sol. Il semblait si grand que mon corps est devenu lourd. En levant les yeux, je pouvais imaginer qu’il y avait des salles privées au rez-de-chaussée et que le dernier étage était un endroit spécial.
A ce troisième étage, 1 500 personnes secouaient leur corps, levant les bras et la masse nous apparaissait comme des roulement de vagues sous la lumière d’une boule à facettes. Un DJ étranger souriait devant à un grand écran et des rayons laser éclairaient la foule présente devant la scène. Je ne pouvais pas empêcher mon rythme cardiaque de devenir plus fort et plus rapide tandis que la vibration créée par le son emplissait les différents espaces qui m’entouraient.
Debout au milieu des gens, je fus frappée par le battement de la musique qui secoua tout mon corps, à la limite de la suffocation, et je me senti enveloppée par la foule, baignant dans une lumière diffuse comme si elle venait de mon propre corps.

Quand arriva le moment de la fermeture du Velfarre au petit matin, nous étions encore là avec Mei. En sirotant mon Coca Cola sur une chaise, j’ai senti une lumière briller dans la partie sombre de mon cœur.
Peut-être que je peux encore considérer ce moment comme un instant de bonheur. C’était à la fois simple et embarrassant, mais je ne ressentais rien d’autre que le sentiment de vouloir recommencer.
Musique, chant, lumière et foule. Quand tout cela est mélangé, je me sens vraiment bien.


Lors de nos visites à Velfarre deux ou trois fois par semaine, nous nous étions familiarisées avec le videur et le personnel de l’étage. Tout le monde savait que nous mentions en affirmant avoir « 18 ans ». Au bout d’un certain temps, ils ont aussi appris que nous étions des artistes débutantes. Même quand ils ont vu dans quels genres de magazines et de séries nous apparaissions, je continuais d’agir comme une adulte. C’était juste le personnel de l’établissement et cela nous permettait d’entrer librement.
Même quand Mei ne pouvait pas venir, je parcourrais seule les escaliers et passais mon temps à me mêler au tourbillon de lumière et de son. Cela devenait mon quotidien, et après trois mois, tous les membres du personnel m’appelaient « Ayu » ou encore « Ayu-chan ».
Je ne faisais plus la queue en arrivant. En allant vers l’ascenseur, mes yeux se posaient souvent sur une autre porte. Elle donnait sur une salle VIP vitrée de haut en bas, entourée par la chaleur d’une vaste piste de danse aussi sombre que le fond de l’eau. Cela faisait-il d’eux des personnes différentes ? En regardant la salle où les clients et les idoles entraient et sortaient, je me suis dit qu’ils faisaient parti d’un monde à part.


À l’automne de cette année-là, à l’âge de 17 ans, j’ai abandonné mon titre d’étudiant du secondaire. Cela ne m’a pas gêné, je n’ai jamais regretté partir du lycée, et mes patrons de l’époque ne me donnèrent aucun avis là dessus. En fait, le nombre de séries télévisées où j’apparaissais avaient augmenté, et passer beaucoup de temps en studio était devenu ma routine quotidienne.
Ma mère ne s’est pas opposée quand je lui ai dit : « Je vais quitter le lycée », la veille de mon départ.

« Parce que tu es quelqu’un d’individuelle Ayu, tu dois décider par toi-même. »

En tant que fille de vendeuse, je savais qu’elle ne pouvait pas contredire ma décision de quitter l’école et me forcer à obtenir mon diplôme d’études secondaires. A cause de moi, elle était devenue mère très jeune et avait dû choisi son propre mode de vie et apprendre à aller de l’avant.
Seule ma grand-mère avait un visage légèrement anxieux, mais elle se mit à rire et posa sa main sur mon dos.
Lorsque je l’ai prise dans mes bras,  son corps était plus petit que le mien, et son visage s’est niché dans mon cou. L’odeur et la gentillesse de ma grand-mère m’ont soulagé. Les mots m’ont manqué pour la remercier d’avoir compris mon état d’esprit à ce moment là. J’ai regardé vers le soleil pour empêcher mes larmes de couler et je lui fus reconnaissante de m’avoir apporter sa chaleur.


Alors que cela faisait 1 an depuis ma première visite au Velfarre, un personnel d’étage avec qui j’avais sympathisé est venu me voir.
Cette personne était responsable de la salle VIP et également responsable du rez-de-chaussée.

« Ayu-chan, je vais d’introduire à la salle VIP. Ça te dis ? »

Dès que je l’ai entendu ça, un frisson a traversé mon corps.

« …Tu es sûr de toi ?
— Ouais. Allons-y ensemble. »

En entrant dans la salle VIP du dernier étage, tout le monde riait, parlait et dansait avec un verre de champagne à la main. On se serait cru à bord d’un train bondé, avec vue sur la piste de danse du troisième sous-sol, que seuls ces gens pouvaient voir.

« C’est difficile de circuler, mais viens avec moi. Vers le canapé du fond.
—… Oui, ok. »

Afin de ne pas perdre de vue cette personne, je suis restée fixé sur son dos en direction de la banquette la plus au fond de la pièce. Il se dirigea vers un homme assis, regarda en arrière, me fit signe, puis il me chuchota à l’oreille.

« C’est le directeur général d’Avex. Masato Matsuura.
— C’est M. Matsuura… »

A ce moment je me demandais si cette personne était bien Max Matsuura, le producteur de musique ?
Je me sentais mêlé d’impatience et d’embarras.
Cette silhouette mince glissée dans un jeans, un t-shirt blanc et une veste en cuir était loin de mon image d’un cadre supérieur. Le visage bronzé par le soleil me faisait plus penser à un jeune garçon, la frange lisse et les yeux froids, et je me demandais vraiment si c’était le même auquel je pensais ? Il semblait attendre quelque chose, la bouche serrée.
Il n’y avait pas un jour où je n’écoutais pas les nombreuses chansons à succès produites par Max Matsuura. Même en allant au karaoké, les hits se jouaient dans toutes les pièces.
Il a fait naitre une vague de chaleur qui a fait évoluer l’industrie de la musique japonaise, et pourtant, à ce moment, il avait l’air si jeune…

Je me suis raidie et inclinée, j’ai levé les yeux sur lui en conservant la tête vers le bas. Une belle femme était assise tranquillement à ses côtés.
Le membre du personnel a de nouveau murmuré à mon oreille.

« C’est la compagne du directeur général.
—…Oh, d’accord. »

J’ai baissé la tête une nouvelle fois et au moment de me relever, une voix sèche parvint à mon oreille.

« Qu’est-ce que tu fais en ce moment ? »

Le producteur me parlait. Cela me surpris tellement que ma voix resta au fond de ma gorge quelques secondes.

«Euh… j’appartiens à une agence de divertissement et je fais de la télévision en ce moment. » Dis-je sans regarder son visage. « Nous avons enregistré et sorti un CD. Un mini-album sortira bientôt. »

Après avoir dit cela, mes joues sont devenues brûlantes et j’avais l’impression d’avoir dit quelque chose de stupide. Discuter de son propre CD avec le meilleur producteur de musique du Japon, cela faisait tellement amateur.

« Quand ?
— Eh bien, la sortie est prévu pour le 1er décembre.
— Très bien… »

Au moment où j’ai croisé le regard du membre du personnel, il avait l’air légèrement inquiet. Puis j’ai entendu une voix qui avait un ton différent que celui des paroles précédentes.

« Mais il ne se vendra pas. Mais parce que la musique ne se vend pas facilement. »

Je n’ai pas ressenti de tristesse en entendant les mots du producteur. Peut-être parce que je savais qu’il avait raison.

« … Oui, je sais. »

Je répondis donc cela et regarda à nouveau le producteur. J’avais envie de prendre une photo commémorative avec ce VIP et de la montrer à Mei. Car je savais que je ne le reverrai jamais, je n’avais pas honte de lui demander.

« Je suis désolée, mais puis-je prendre une photo avec vous ? »

Quand j’ai demandé cela innocemment, il a acquiescé immédiatement.
Je me suis mise à côté de lui et les membres du personnel se sont levés pour actionner l’appareil photo.

On m’a remis une photo polaroid qui était encore noire, je me suis inclinée puis j’ai quitté la salle VIP. Tout en secouant la photo avec ma main droite, je suis allée en direction du troisième sous-sol par l’ascenseur et j’ai attendu que l’image devient lisible malgré la faible lumière sous la boule à facettes. Il y avait dessus le directeur général avec son air peu amical et moi-même, surprise telle une enfant avec les yeux grands ouverts.
Mais j’avais rencontré le vrai Max Matsuura. Je pouvais m’en vanter auprès de Mei. En pensant à tout ça, mon cœur s’était réchauffé.


La musique ne se vend pas facilement.

Ce jour-là, les paroles du producteur ont résonné dans mes oreilles et me reviennent encore de temps en temps.
Je le pensait vraiment aussi. Ma chanson n’était qu’un passe-temps. Ma grand-mère aimait m’entendre, alors cela me suffisait.
Je regardais les artistes aux millions de ventes à la télévision avec le sentiment de regarder des stars intouchables. Je pensais du fond du cœur que jamais ma musique n’atteindrait l’âme de quelqu’un.

La veille du Nouvel An cette année-là, j’avais demandé au personnel de Velfarre de nous obtenir des billets pour l’évènement de la St Sylvestre.
Le ciel sans lune de cette nuit à Roppongi était lumineux. Mei et moi portions une mini robe sous notre manteau et marchions vers l’escalier qui brillait de milles feux.
La salle VIP, qui était décorée pour cette occasion, nous a été permise par les membres du personnel avec qui nous étions proches. Même pour cette nuit de fin d’année.
Il y avait le producteur au centre de la salle où modèles, chanteurs, idoles et candidats idoles se mouvaient comme des poissons migrateurs. Je ne l’avais pas revu depuis ce jour-là, et je voulais m’en éloigner, paniquée. Mais nos regards se sont croisés à ce moment là. Puis, la voix du producteur a résonné à mes oreilles.

« Tu es si mignonne.
—Euh… »

Oh, vous ne vous souvenez pas de moi ? A peine avais-je eu le temps de le penser qu’il continua de me parler :

« Attends, j’ai l’impression qu’on s’est déjà rencontré. N’est ce pas ? Ici, non ?
— Oui, j’ai pris une photo avec vous ici la dernière fois. »

Le directeur général, en voyant la photo polaroid sortir de mon portefeuille, s’est mis à rire.

« Je suis désolé, cela ne me reviens toujours pas.
— Oui c’est normal, ce jour-là je suis venue vous parler pendant seulement quelques minutes. »

Je m’attendais à ce que la conversation se termine ici donc je me suis incliné et j’ai commencé à faire demi-tour. Mais, j’ai entendu sa voix dans mon dos et cela m’a arrêté en plein mouvement.

« Quel est ton nom ? »

J’ai regardé en arrière et dit.

« Ayumi Hamasaki. Mais tout le monde m’appelle Ayu. »

La vision de cet homme important prenant sont téléphone m’a parue se dérouler au ralenti.

« Quel est ton numéro de téléphone ? »

J’avais l’impression de vivre un moment hors du temps.

« …Ayu, c’est ça ? »

J’étais tellement surprise que mon visage était figé. J’ai donné mon numéro et j’ai constaté que mes lèvres étaient sèches. Il s’est mis à répéter le numéro à dix chiffres, puis a appuyé sur le bouton d’appel de son téléphone portable. « Voici mon numéro », a-t-il dit. Sa voix était pleine de gentillesse. Puis je me suis souvenue que c’était le réveillon du Nouvel An et que j’étais au beau milieu d’une grande fête.
Quand l’immense piste de danse s’est mise à briller comme un vaisseau spatial et que tout le monde a accueilli la nouvelle année d’une manière bruyante, j’étais dans un autre espace-temps, j’avais l’impression d’être sur une plage, au calme. Mais en regardant les épaules nues et les bras minces de Mei qui balançait son corps à côté de moi, l’illusion s’est évanouie et tout à coup le bruit assourdissant de la soirée m’est revenu aux oreilles.
Je venais de parler avec le célèbre producteur du Japon et il m’avait demandé mon nom et mon numéro de téléphone. Tout de suite après, une personne du personnel est venue me parler.

« M. Matsuura cherche la prochaine étoile montante dans cette salle VIP. La future étoile se cache dans cette boîte, et c’est notre travail de trouver cette pierre précieuse. Les chansons de cette star changeront à jamais la scène musicale japonaise. »

En rentrant de cette immense et magnifique soirée de la St Sylvestre, dont on parla par la suite dans tout le Japon, j’ai senti un éclair de lumière me parcourir alors que je me dirigeais vers la station de métro dans la matinée encore sombre. Je ne pouvais pas en comprendre le sens, mais quelque chose s’est réveillé en moi et je n’avais jamais ressenti ça. Je me sentais au début de quelque chose mais je ne savais pas encore de quoi.

Le reste de journée, je ne pouvais pas rester immobile. Plusieurs fois, j’ai regardé mon téléphone et ouvert mon carnet d’adresses. A chaque fois, je m’arrêtais sur son numéro en étant sûr qu’il ne m’appellerai jamais.
Mais, alors que je pensais vraiment qu’il n’allait jamais m’appeler, le téléphone a sonné le lendemain. Pourquoi fus-je si surprise en voyant son nom affiché ?
J’ai dit « oui » en décrochant à la première sonnerie et il m’a demandé si j’allais bien. Je ne pouvais que répondre « oui » à nouveau. La main tenant le téléphone tremblait. Le tremblement n’a pas disparu, même lorsque j’ai raccroché.

Puis, je suis retournée travailler et je ne pouvais plus répondre au téléphone. Mais je ne me souciais plus de savoir quoi faire si je recevais un appel entrant. Le deuxième appel quelques jours plus tard a donc eu lieu quand j’étais au travail et lorsque j’ai regardé l’historique des appels, j’ai paniqué.
J’ai vu un message sur le répondeur.

« C’est Matsuura. Si tu écoutes ce message, peux-tu me rappeler… »

Je l’ai rappelé immédiatement sans écouter la fin du message, et je suis tombée sur une voix douce.

« As-tu fini de travailler ? »
— Oui, j’ai terminé. Je suis désolée, je ne pouvais pas répondre au téléphone. »
— Ce n’est pas grave, je ne suis pas pressé. »

Il m’a dit qu’il y avait une fête au Velfarre et qu’il m’attendrait dans la salle VIP.


J’ai retrouvé le producteur dans la salle VIP le soir de la fête. Ce jour-là la pièce était remplie de personnes présentes à la soirée du Nouvel An, et il y avait vraiment plus de monde que d’habitude, mais les membres du personnel que je connaissais m’avaient laissé une place à côté du producteur. Je me suis assise, pris une profonde inspiration, et ma boisson habituelle, du gin tonique avec du citron, m’a été apporté.
Le producteur s’est emparé de mon verre et en a bu une gorgée en disant : « Qu’est ce que tu bois ? » Immédiatement, je me suis essuyée la bouche avec le dos de la main droite.

« Qu’est ce que c’est ? Du gin c’est ça ? »

Il m’a regardé gentiment en reposant le verre à sa place, puis a déclaré :

« Quel âge as-tu Ayu ?
— 17 ans. J’aurai 18 ans en octobre de cette année.
— Tu es lycéenne ?
— Non, j’ai quitté le lycée l’année dernière. Maintenant, je travaille uniquement. »

Après cela, il croisa les bras, jeta un coup d’œil sur sa grande montre-bracelet noire et mate et me dit soudainement :

« Rentres chez toi pour aujourd’hui. Prends un taxi. »

Je suis restée au Velfarre encore 15 minutes, puis le personnel est venu me chercher pour me conduire vers un taxi qui m’attendait à la sortie. Je suis montée à l’intérieur et la voiture s’est dirigée vers Nakano où se trouvait ma maison.
Quand je suis arrivée chez moi, ma grand-mère a ri et m’a dit « Ayu-chan, tu as fini le travail tôt aujourd’hui, c’est bien, j’allais faire du riz mais je vais plutôt cuisiner la salade d’avocats et le hamburger préféré de ma Ayu-chan, mais d’abord va prendre un bain. »
Nous avons mangé toutes les deux et nous sommes allées nous coucher tôt. Nous nous sentions d’une humeur chaleureuse. J’ai posé mon téléphone sur la table de chevet et je me suis endormie avec la paume de la main dessus, en attendant le prochain appel comme un signe du destin.

Mon téléphone n’a pas sonné avant plusieurs jours. Bien sûr, je pouvais aller le voir dans la salle VIP. Une fois le boulot terminé, je me rendais là-bas, le saluais de la main, puis il me faisait signe d’approcher et nous passions du temps ensemble. Nous ne nous racontions rien de spécial, nous restions juste l’un à côté de l’autre.
Il lui arrivait d’avoir des réunions avec le personnel d’Avex. Ils se parlaient longuement au téléphone, ou alors des invités et des clients venaient directement et au final il parlait beaucoup de son travail. Il y avait des mots que je ne connaissais pas, mais je savais que ces mots étaient liés à la musique et aux enregistrements.
J’étais juste silencieuse au milieu de ces conversations vertigineuses, et lui buvait beaucoup d’alcool sans rien manger. Il m’arrivait de retenir mon souffle, regardant ailleurs.

Après quelques semaines, le producteur m’a convié à un repas avec ses proches. Nous sommes sortis du Velfarre et sommes allés au restaurant. Ils marchaient tous vite et je courais derrière comme un petit chiot pour ne pas perdre les perdre de vue.
La personne la plus proche du producteur et son ami de lycée s’appelait HIRO. C’était une personne stricte et dure. Mais de temps en temps, ils me laissaient venir accompagnée de Mei.
M. HIRO était membre d’un département de chanson et de danse, mais quand son unité s’est dissoute en 1995, il a secondé des artistes populaires en tant que danseur, et formé une nouvelle unité de danse. HIRO pouvait écouter le directeur général parler pendant des heures.
Ce dernier nous parlait de l’avenir du divertissement japonais, de sa vision des choses et de la voie qu’allait suivre Avex. Dans ces moments là, nous savions que le destin était en marche et HIRO-san a souvent déclaré qu’il voulait faire parti de tout ça, et cela a porté ses fruits.
Je restais encore silencieuse à cette époque. J’écoutais attentivement la conversation tout en continuant de manger mes sandwichs et j’imaginais toutes les chansons et les danses nées de ces instants, et mon cœur se remplissait de chaleur. Jusqu’au moment où je me suis demandée pourquoi je n’en ferais pas partie moi aussi.


Un jour, le producteur s’est tourné vers moi, qui écoutait toujours en silence, et il m’a soudainement dit :

« Quel genre de musique aimes-tu Ayu ? »

Tout à coup, je ne savais pas quelle réponse était la plus correcte à donner. Donc, je n’avais pas d’autre choix que de répondre honnêtement.

« Quand j’étais en primaire à Fukuoka, j’adorais les disques de rock que mes parents écoutaient, et je les ai mis sur cassette pour les écouter encore de temps en temps. J’aime toujours le rock comme Led Zeppelin ou Deep Purple.
— Alors c’est ça que tu aimes, le rock ? »

Devant son expression, je pensais vraiment qu’il allait me demander de sortir.

« Alors allons écouter du rock ! »

Le taxi s’est dirigé vers un bar de Nishi-Azabu. Le producteur, un habitué de longue date ici, a bu plusieurs verres de liqueur qui lui ont été offerts par la maison. Comme si les gens savaient ce qui allait se passer, ils ont commencé à affluer autour de nous.
Il m’a dit que nous pouvions choisir n’importe quelle musique pour qu’elle soit diffuser dans le bar.
Je me suis mise à repenser à toutes ces chansons de mon enfance, Led Zeppelin, Deep Purple, Guns N’ Roses, Aerosmith, Van Halen et des paysages nostalgiques me sont revenus à l’esprit. C’était complètement différent de ce que je pouvais voir à Tokyo. Puis quand ma chanson favorite de Led Zeppelin « IMMIGRANT SONG » s’est mise à jouer, les paroles sont sorties toutes seules de ma bouche.

Ah…. ah….
Come from the land of the ice and snow
(je viens du pays de la glace et de la neige)
From the midnight sun
(sous le soleil de minuit)
Where the hotsprings flow
(où coulent les sources chaudes)
Comin’ of the cold
(allons dans le froid)
Drive our ships to new lands
(conduire nos navires vers de nouvelles terres)
Fightin’ the haul, singin’ and cryin’
(hisser le flambeau, chanter et pleurer)
I am coming
(j’arrive)

Quand j’ai jeté un œil à côté de moi, j’ai vu le producteur sourire en regardant mes lèvres.

« Ayu, tu peux chanter si tu veux. »

En entendant cela, j’ai secoué la tête et mes épaules de gauche à droite.

« Non, je ne peux pas chanter.
— Mais tu as sorti un CD.
— Ce n’est pas la même chose… »

Il y avait un karaoké au bar, il était donc inutile de nier que je ne pouvais pas chanter.
Le producteur a parlé au personnel chargé de la musique, et lorsque l’accompagnement a commencé à se jouer, il m’a tendu le micro.

Eh bien, allons y…

C’était une chanson que je connaissais et j’en avais mémorisé les paroles, mais je n’arrivais pas à la chanter correctement devant le fameux Max Matsuura. Mon cœur battait plus vite que le rythme de la chanson.

« Continues, tu chantes très bien. »

Lorsque le producteur m’a dit cela, j’ai commencé à suivre les paroles sur le moniteur et je me suis appliquée à chanter.


C’était une chanson avec des notes aiguës et un chœur pour accompagner le chanteur. Le producteur m’écouta en silence jusqu’à ce que j’ai terminé de chanter.
Mais je m’étais trompé à certains endroits, j’étais montée trop haut dès le début et ma voix n’arrivait pas à redescendre aux bons moments… En baissant le yeux vers le fameux Max Matsuura, je me suis sentie si ridicule mais il a déclaré en souriant.

« Vas y, fais la chanson suivante. »

Je chantais les chansons les unes après les autres pendant que le producteur écoutait assis au comptoir. Je voulais vraiment paraitre à l’aise mais je transpirais comme un athlète qui venait de courir un marathon.
J’avais l’impression d’être un clown. Parfois j’avais envie de pleurer, mais au bout d’un moment j’ai vraiment commencer à apprécier. J’ai saisi plus fermement le micro, et ils ont continué à m’écouter chanter avec attention.
Au bout d’un moment, le producteur regarda sa montre étrange et appela un taxi.

« C’est tout pour aujourd’hui. On se revoit bientôt. Je te rappellerai. »

Pour une fois, j’ai pris le temps de discuter avec lui en attendant le taxi et je me suis mise à penser que je pouvais commencer à être plus à l’aise avec le producteur. J’avais passé un moment beaucoup plus amusant que mon travail d’actrice ou de mannequin.
Les jours de congés suivants, j’attendais juste son appel.

Au bout de notre septième rendez-vous, le directeur général m’a emmené faire un tour dans la ville où il avait grandi, Yokohama. Il y avait un port, des parcs, des zones industrielles et un centre-ville animé ressemblant à ma ville natale de Fukuoka. La raison pour laquelle je me souvenais que c’était la septième fois, c’est parce que j’avais gardé le nombre d’appels du producteur dans mon agenda.
Dans le parc, nous avions une vue surplombant le port d’où nous pouvions sentir le vent souffler. Je m’amusais à tracer la ligne d’un immense pont du bout mes doigts, et j’ai murmuré vers la mer d’un bleu brillant que nous étions à l’endroit où Max Matsuura était né.

« Tu es si drôle. »

Depuis enfant, on ne m’avait jamais dit qu’on me trouvait drôle. Je me suis donc mise à rougir si fort que mes oreilles sont devenues toutes rouges et je n’avais nul part où me cacher.


Quand je suis allée du parc au parking, j’ai été surprise moi-même de dire cela au producteur :

« Si vous vous tenez la main dans un endroit comme celui-ci, peu importe qui vous êtes l’un pour l’autre, c’est que vous êtes tout simplement amoureux. »

A ce moment là, j’aurai voulu que le producteur me tienne la main en me donnant raison, mais bien sûr, ce n’était pas le cas, et il y eu juste un silence entre nous. Cependant, quand j’ai regardé son visage, j’étais heureuse de voir que le producteur avait un regard timide. Cela m’a fait plus plaisir que si nous nous étions tenus la main.

Les saisons se sont enchaînées depuis ce rendez-vous avec le producteur. J’ai continué à le voir pour faire des séances de karaoké au Nishi-Azabu, et j’ai commencé à passer moins de temps au Velfarre. Dans ce bar, au lieu des actrices et mannequins étincelants, nous côtoyions plutôt des gens ordinaires, venant se détendre après une journée de travail. Les rencontres entre le directeur et les chargés de production de chez Avex se faisaient également beaucoup plus fréquentes. J’ai pu voir de plus près toutes ses personnes écrire l’histoire de la musique japonaise et j’ai parfois pensé que c’était un milieu un peu effrayant. Le producteur avait plus de 30 ans, mais d’apparence il faisait la vingtaine, et le personnel autour de lui faisait encore plus jeune.

Je pouvais chanter musique après musique dès que j’avais le micro en ma possession.
Je n’étais pas spécialement douée pour le faire, mais je n’étais pas mauvaise non plus, et ma voix ne semblait pas si horrible que ça. Je prenais plus de confiance et le producteur a commencé à me faire quelques commentaires. Mais ce n’étais pas tous des compliments.
Si je restais concentrée sur la chanson, ma voix aiguë commençait à monter progressivement.

« Je ne suis pas douée pour ça, mais je commence à aimer chanter »

Le sens de cette phrase était faux. Je n’aimais pas chanter des chansons, mais j’aimais le temps que je passais à les chanter. Je me sentais toujours nerveuse, mais lorsque je me trouvais à côté de lui, que je chantais les paroles des chansons qu’il voulait entendre, la solitude qui m’accompagnait depuis mon plus jeune âge commençais à s’estomper peu à peu.

Un soir, peu après minuit, le producteur m’a accompagné à mon taxi qui me ramenait chez moi.

« A plus tard. »

J’ai regardé la silhouette du producteur s’éloigner depuis l’arrière du taxi jusqu’à ce qu’elle disparaisse de mon champ de vision.
A quoi pensait le producteur ? Pourquoi m’emmenait-il avec lui ? Pourquoi me laissait-il chanter ces chansons ? Je n’avais pas les réponses à mes questions. Parce que cette personne ne me parlait jamais de ça.
Mais je ne ressentais pas de gêne, pas même une pointe de doute. Depuis mes 15 ans je laissais les gens de ma société gérer ma vie et mon image et je pensais que cela me suffisait mais cette personne silencieuse venait de bouleverser mon petit monde.
Je sentais chaque jour que la tristesse qui emplissait mon corps diminuait. Mon cœur qui semblait aussi lourd que du plomb commençait à devenir plus léger.
J’ai senti que le regard de cette personne pouvait éclairer le ciel nocturne sans lune ni étoiles, et j’ai passé pour la première fois une nuit sans avoir peur du lendemain.


L’hiver suivant, j’ai décidé de ne pas renouveler mon contrat avec ma boîte. Cela m’ennuyait de jouer les lycéennes dans des séries télévisées, et quand je portais un maillot de bain et posais devant un photographe, je n’arrivais pas à sourire naturellement.
Lorsque j’ai signé la fin de mon contrat au bureau et que je suis rentrée chez moi, j’ai appelé le producteur pour l’en informer. J’ai essayé de prendre une voix vide de tous sentiments pour lui annoncer la nouvelle.

« J’ai stoppé mon contrat. Je viens de rentrer du bureau, j’allais en parler à ma mère. »

Après lui avoir dit ça, le directeur général m’a demandé :

« Ok ! Qu’est-ce que tu vas faire maintenant ?
— Ce que je vais faire… Je n’ai encore rien décidé. »

Avant de pouvoir lui dire que je voulais en parler avec ma famille, il a enchainé :

« Tu sais, si tu ne te décide pas rapidement tu risque d’être en difficulté. Tu as quitté le lycée, tu n’as plus d’emploi et tu ne pourras pas rester longtemps dans cette situation. »

Cela m’a fait rire d’entendre l’inquiétude dans sa voix à travers mon téléphone portable. Cela faisait un an que j’avais rencontré le producteur et je n’avais jamais pensé qu’il pouvait se faire du soucis pour moi.

Le directeur général a déclaré : « Bon… » puis a attendu 5 secondes avant de me demander :

« Est-ce que tu veux chanter ? »
— …Quoi ?
— Et bien c’est pour cela que je t’écoute chanter.
— Chanter ? Vous voulez dire comme une vraie chanteuse ?
— En effet.
— … Je ne peux pas chanter.
— Pourtant tu chante bien au karaoké.
— Mais parce qu’on me dit de chanter.
— Non, c’est déjà décidé. Ayu, viens dans ma maison de disque. Et chante.
— Chez Avex ? Pas question…
— Rejoins ma maison de disque.
— Mais, je ne peux pas chanter. »

Puis j’ai sauté dans un taxi car le producteur a dit qu’il voulait me voir en personne au lieu de continuer cette conversation au téléphone. Les visages des chanteuses qui ont frappées les esprits ont défilé devant mes yeux.
Les chanteurs sont des gens qui sont nés pour chanter. Ceux qui ont voulu tenter l’expérience sans en avoir le talent n’ont jamais réussi à atteindre leurs objectifs.

Trente minutes après avoir raccroché, j’attendais dans une salle privée d’un restaurant. Avant de parler, j’ai pris une profonde inspiration et j’ai demandé :

« Pouvez-vous le faire ? Pouvez-vous vraiment faire de moi une chanteuse ? »

Puis j’ai ajouté à la fin : « S’il vous plaît, ne me mentez pas. », et il m’a déclaré ces mots sans un seul signe de mensonge :

« Oui, je pourrais te payer des cours de chant. »

J’ai regardé le directeur général avec le menton légèrement relevé. Je pense qu’il avait remarqué que j’étais encore septique. Le producteur m’a alors dit d’un ton fort que je n’avais jamais entendu auparavant :

« Aies confiance en moi. »

Au moment où j’ai entendu ces mots, des larmes ont coulé sur mes joues. J’étais remplie d’anxiété mais en même temps j’étais soulagée et j’avais vraiment envie de passer du temps avec le producteur.
Je me suis dit que je pouvais devenir chanteuse.

« Je dois d’abord en parler avec ma famille. »

Je suis rentrée chez moi et j’ai parlé à ma grand-mère et à ma mère de ma conversation avec le producteur. Deux personnes qui ne connaissaient ni Avex ni Max Matsuura étaient sans doute les meilleures pour me porter conseil sur ce nouveau travail.
Au moment d’aller me coucher, je ne pouvais pas dormir car mon anxiété et ma joie oscillaient comme un pendule.
Quand j’étais enfant, j’étais devenue l’égérie d’une petite banque locale. Puis au lycée, je suis entrée dans la boîte que je venais de quitter, j’ai déménagé à Tokyo pour tourner dans des séries télévisées et faire le métier de mannequin et j’allais à présent devenir chanteuse dans une maison de disque populaire…

Au petit matin, j’ai passé un appel impulsif au producteur, et j’ai laissé un message sur son répondeur disant que je ne pouvait pas être chanteuse, que je ne voulais plus le faire. Au final, je me sentais vraiment capable de chanter… mais comme je n’arrivais pas à trouver la réponse en moi, je pensais ne pas pouvoir y arriver. Immédiatement, je l’ai rappelé et j’ai déclaré de ma voix tremblante que je voulais écrire moi-même mes paroles.

Il m’a enfin rappelé un peu avant midi. Je savais qu’il détestait les gens aux attitudes indécises, mais il ne semblait pas fâché au son de sa voix.

« Ayu, je te le répète.
— … Oui ?
— Aies confiance en moi.
— … D’accord, je vais chanter. »

Il n’y avait plus de retour en arrière possible. Je croyais fermement aux paroles de cette personne.
En levant les yeux à travers le rideau vers ce ciel d’hiver ensoleillé, j’ai décidé de commencer pour la première fois à croire en cet homme.